3 février 2016

Retour à belle Étoile

Je sors des premiers chapitres de "Retour à Belle Étoile" de Gérad Glatt, définitivement. 
Les heures sentent le soleil et la terre dans la ferme auvergnate de Cécile et Jules Rochette tandis que celui-ci envisage d'engager un ouvrier supplémentaire, car il y a trop de travail pour deux hommes depuis la mort du beau-père, et puis le robuste Victor se fait vieux. Expédition en Celtaquatre chez les Besse dont le fils Guillaume, dit le Guilh, conviendra bien à Valliergue, car les Besse n'ont pas assez de terres ni de bêtes pour occuper tout leur monde. Le père maugrée, on se fâche un peu, tapes dans le dos, la mère pleure et espère que le fils reviendra de temps en temps, on sort le vin gris, rots après l'omelette au fromage, gouttes essuyées sur le menton, nouvelles tapes dans le dos, et on titube, mais ça ira pour la route en voiture. À Valliergue la mère, autorité de l'ancienne, jauge le nouveau, nouvelles larmes en se rappelant le défunt mari, c'est lui qu'on remplace, mais le Guilh est bienvenu, il s'habituera, à la ferme, à Victor, à tout, il est radieux déjà, d'ailleurs on va l'écrire aux parents, puis Jules et Cécile sont béats sous les draps dans l'obscurité, l'avenir s'annonce bien, c'est l'amour et ce sera Marguerite dans neuf mois. Caricature. 

Tout cela est d'un convenu assommant et j'imagine déjà les chapitres suivants, Marguerite âgée d'un an sur la tombe de son grand-père, les larmes que versera sa femme au départ de Jules pour le front et celles de Marguerite à sa mort. J'ai cru à l'une ou l'autre subtilité, à un rien de mystère, j'ai même espéré quelque fourberie, mais tout est vraiment si heureux qu'on en pleure et le sera sans coup férir, malgré les malheurs à venir et surtout les émotions.

Qu'on ne se méprenne pas : "Retour à Belle Étoile" est bien écrit, la phrase est agréable, il est imprégné d'une harmonieuse musique naturelle. Il y a tout simplement qu'il arrive de se tromper de livre, j'ai cru en le sollicitant qu'il me conviendrait. J'ai confié le livre à une personne qui a l'habitude de faire son miel des romans de Christian Signol. Lors de mon dernier sondage, elle était emballée et s'est dit très émue par l'histoire de Gérard Glatt. 

En lecture, chacun a ses domaines et les uns valent les autres, pas d'élitisme. 

Je tiens à remercier Babelio (peau neuve là) et Les Presses de la Cité pour l'envoi du livre, s'il est inadéquat pour moi, il comble les amateurs de romans régionaux français, comme l'indiquent les critiques du site très populaire consacré à la lecture.

Bien, il me reste à relire ou revoir la trilogie de Pagnol. Ou rappeler Marie-Hélène Lafon qui sort du lot régional avec de magnifiques portraits aiguisés (Joseph). Et retourner vers mes polars sombres et turpides, mes poètes belges rosselisés, mes essais alambiqués et mes Maigret.

– «Mais, christw, Maigret c'est de l'attendu, toujours la même chose, les tics du commissaire, c'est pareil que le roman régional ?»
– «Oui ? mais non... bon... c'est-à-dire que...»
– «Malhonnête !»

16 commentaires:

  1. Il m'arrive, comme vous, de laisser une lecture qui me paraît sans relief, tout en sachant que cette attente (exigeante) de surprise ou émerveillement est sans doute exagérée. Que se laisser emporter par une belle écriture, simplement, est fort plaisant...
    Je note, vous le devinez, le nom de ce poète belge Eugène Savitzkaya, merci!

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    1. Il y a quelques années, je n'aurais sans doute pas tant rechigné à passer une heure ou deux pour entrer complètement dans un livre qui promet quelques émotions. En vieux lecteur je suis exigeant, c'est vrai. Rassurez-vous je ne suis pas encore victime de la gestion efficace du temps de mes loisirs ;-) 
      Mais il y a parfois des priorités à donner.

      Savistzkaya, si vous voulez, il y a deux petits billets antérieurs (via la liste des auteurs).
      Passez une belle journée Colette, content de vous savoir de retour en forme sur les blogs.

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  2. Je ne parviens plus à lire un livre qui n'éveille rien chez moi, je l'ai fait longtemps parce que je faisais des compte rendus pour une association mais aujourd'hui je ne veux plus perdre mon temps
    Rares très rares sont les romans de terroirs qui atteignent vraiment la qualité, j'aime particulièrement par exemple les textes de Jean loup Trassard magnifiques http://www.jeanlouptrassard.com

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    1. "Perdre son temps", les mots sont dits. Vous êtes certainement plus au fait que moi de ce genre de romans et de vous lire partager mon avis me rassure. Maintenant je ne dis pas que celles et ceux qui les aiment perdent leur temps, ils y trouvent satisfaction et c'est essentiel (de plus ils lisent !)
      Je suis d'emblée intéressé par J-L. Trassard, ce monsieur avec un hybride numérique en main, il a des atouts pour me convaincre... 
      Merci beaucoup pour l'information Dominique.

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  3. Un peu pareil, j'ai tendance à insister quand c'est mal "embarqué" mais pas outre mesure, car il y a tant et tant à lire ! Bonne journée

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    1. Tant à lire, pourquoi s'ennuyer à insister, c'est vrai.
      À bientôt K.

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  4. Je ne vais pas spontanément vers les romans "de terroir", j'y ai trouvé rarement mon compte, mais je comprends que l'on puisse aimer. Il m'arrive aussi de me tromper, mais j'ai du mal à abandonner.

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    1. «Du mal à abandonner», j'ai eu beaucoup cette attitude, comme si un livre commencé était un devoir à finir, un contrat à remplir. Une forme de discipline si vous voulez. Je préfère cultiver cet aspect en m'efforçant de terminer un livre difficile, énergivore et qui m'intéresse.

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  5. J'ai lu la série des Michelet il y a très très longtemps, j'aimais bien, mais il faut croire que 'j'ai changé' ^_^; on m'a envoyé des romans de cette maison il y a deux trois ans, alors j'ai essayé, mais rien à faire. Ce n'est pas mal écrit, l'histoire est sans doute intéressante, il y a de la documentation, mais... je m'ennuie un peu. Vous avez bien fait de le donner à quelqu'un qui aime Signol, vous avez fait une heureuse, et ce livre a trouvé son lecteur; de mon côté j'avais donné mes exemplaires à la bibli, dont certains usagers raffolent de terroir et ont fini par tout lire, à force.
    Bref, j'adore MH Lafon, ce n'est pas du 'terroir', c'est comme si Jourde et sa Première pierre en était aussi. Il faudrait que je relise Marguerite Audoux, pour voir.
    Ceci dit Terres de France est une bonne collection, mieux écrite que certains trucs modernes, mais ça tourne parfois en rond. Comme dit ma mère (qui en raffole)'encore la guerre, je saute les passages'
    Cela me rappelle que j'avais reçu (sans le demander) un livre plutôt érotique (la femme qui s'ennuie, etc) et j'ai trouvé une blogueuse qui voulait le lire; l'histoire se termine donc bien pour le pauvre roman dédaigné.
    Moralité : chaque livre a son lecteur, il suffit que la rencontre se fasse.
    Quand même, quand j'ai vu le début du billet, j'ai pensé 'mais qu'allait-il faire dans cette galère?'^_^

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    1. Je comprends que vous êtes de mon avis. Je suis amusé de vous savoir interloquée par le début du billet et par le livre lui-même j'imagine... : qu'allais-je faire dans cette galère...!
      Je ne connais pas Marguerite Audoux, à suivre, merci.

      Oui, chaque livre devrait trouver son lecteur, pensons à celui qui l'a écrit. Que ce soit du terroir ou autre chose, c'est l'écrivain qui travaille et prend le risque de n'être ni lu ni apprécié. Respect.
      À bientôt Keisha.

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  6. J'adore quand dans un blog quelqu'un dit qu'il n'a pas aimé une lecture, pour au moins deux raisons : d'abord cela m'enlève un poids sur la conscience , je n'ai pas besoin de noter un livre que de toute façon je n'aurais pas le temps de lire, et puis surtout cela me donne confiance dans les blogs pour choisir mes lectures . Si on n'aime pas tout on a davantage confiance dans les compliments. ("Sans la liberté de blâmer, il n'est pas d'éloge flatteur")

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    1. Merci pour l'adage "Sans la liberté de blâmer, il n'est pas d'éloge flatteur". C'est une intelligente conclusion qui embellit cet espace d'échanges.

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  7. J'admire ceux qui perdent leur temps dans des livres qui ne leur conviennent pas, j'en suis totalement incapable, comme je suis incapable de montrer du doigt un livre que je n'ai pas aimé, préférant consacrer mon énergie aux belles découvertes. Mais j'entends ce que vous dites, luocine, on me le reproche souvent (de ne pas descendre mes mauvaises lectures). Je préfère l'enthousiasme, et construire que détruire, que voulez-vous. Tant pis si je perds des lecteurs au passage, je m'en fous :-).
    Quant à Brassard, Dominique, je ne le place pas dans le "terroir", oh non, quelle insulte pour ses livres ! Ils sont tellement au-dessus !

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    1. Je suis plutôt d'accord de ne pas pointer les livres qu'on n'a pas aimé, énergie perdue, il se fait qu'ici, le contrat avec Babelio était le livre en échange d'une critique.
      Et c'est bien d'insister avec Trassard, vous êtes deux de bon conseil, je l'ajoute sur ma liste pour la bibliothèque demain.

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  8. On a parfois envie de sortir de ses chemins de lecture habituels, mais quand on sent comme vous le décrivez bien l'ennui qui pointe, à quoi bon insister ? Avec les années, je me sens plus libre d'abandonner un récit qui ne me dit rien.

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    1. C'est bien cela, j'ai longtemps fait comme Aifelle, que je comprends bien, tenant à venir à bout de toute lecture entamée. Ça va mieux...

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