21 août 2016

Économie : garde-fous libéraux

Suite du récapitulatif de l'essai "Réveillez-vous" de l'économiste Nicolas Baverez.
Crise de la dette - Tiers monde - Changement climatique

Quatre leviers pour sortir de la crise
  • Générer des gains de productivité en améliorant le capital humain par l'éducation et l'innovation
  • S'adapter et réinventer des modèles : au nord, priorité à l'investissement productif et refonte des États-providence ; au sud, priorité à la consommation, à l'ouverture des marchés et progrès de l'État de droit.
  • Limiter les risques globaux en créant une vraie coopération des pôles de la mondialisation et de leur banques centrales (enlisement de la coopération purement étatique, des ONU, G20,...)
  • Rétablir la confiance dans les politiques, les institutions publiques et l'entreprise.
© Deligne
Il reste des moteurs pour la croissance

La croissance de la démographie (9,5 milliards en 2050) ; le développement de l'Afrique et la demande du sud, avide de consommation et d'autonomie ; l'économie de la connaissance et de la transition écologique.

Ce qu'il (ne) faut (pas) faire

«Alors que les émergents ont réussi leur décollage en faisant le choix du marché et du libre-échange, la France ne cesse de privilégier l'État et le protectionnisme pour trouver une issue à la crise. Alors que tous les pays développés qui ont réussi à se libérer de l'étau de la crise ont misé sur la baisse des dépenses publiques, l'investissement et l'innovation dans le secteur marchand, la libéralisation du marché du travail, l'autonomie des acteurs sociaux, l'insertion dans la mondialisation, le renforcement des libertés publiques, la France préfère cultiver ses obsessions nationales et aller dans le mur en accordant la priorité à la hausse vertigineuse des impôts, à l'investissement public, à la rigidification du marché du travail, à l'inflation des normes, au dirigisme d'État et à la reconconstruction des frontières économiques au détriment de la construction européenne. » (Baverez)

Lâcheté de la classe politique

«Soyez libéraux, soyez socialistes, mais ne soyez pas menteurs »,
implorait JacquesRueff.

Depuis 1981, les majorités successives n'ont pas expliqué la rigueur par l'intérêt national mais l'ont mise au débit de la mondialisation et des contraintes dues à l'Europe, de sorte que les Français ont fini par détester celles-ci. Baverez reproche à ces dirigeants, toutes majorités confondues, de ne pas avoir expliqué aux Français la profondeur des changements du monde, de ne pas leur avoir exposé la situation objective, non gouvernée par l'idéologie. Nicolas Baverez utilise sans détour le mot "lâcheté".

© Xavier Gorce
Attitude des citoyens

Face à une démocratie malade, les citoyens ont le choix entre quatre attitudes. 
  • Le repli sur la sphère privée, comme la famille. 
  • La fuite, à travers l'exil ou le basculement dans l'utopie. 
  • La révolte et la violence, déjà présentes par les mouvements sociaux et les émeutes urbaines. 
  • La responsabilité, qui remet les réussites privées au service du bien commun. 
© Wingz
Les quatre voies de Baverez

Quatre solutions ont été explorées, par le passé, pour le redressement des nations démocratiques en difficulté.

  • La première, respectueuse des citoyens, passe par les élections. En 1979, les Britanniques ont choisi une rupture radicale avec M. Thatcher. En 1980, les États-unis ont fait de même avec Ronald Reagan. Le modèle économique et social a été bouleversé, ainsi que les structures politiques.
  • Une thérapie de choc conduite par un homme d'État convaincu de la nécessité des réformes : G. Schröder, réélu par surprise en Allemagne en 2002, lança, avec l'appui de l'opposition chrétienne-démocrate, les fondations d'un nouveau miracle économique.
  • Une solution éloignée des mécanismes de la démocratie : acte de la faillite de la classe politique et des institutions par un changement de régime, avec l'entrée en scène d'un homme (d'une femme) providentiel(le). Le général de Gaulle en 1958 refonda la République, au terme d'une sorte de coup d'État légal.
  • Dernière hypothèse : mise sous tutelle politique et financière par d'autres puissances et organismes internationaux, tels FMI et Banque mondiale (Pays baltes, Hongrie, Grèce, Irlande , Portugal).
© Chrib'
Conclusion

Le livre de Nicolas Baverez évite la langue de bois. Il cible les investissements publics (services, agents) au plan national et les structures politico-financières au plan européen. Bien que lourd de redites, manifestement porté par l'envie d'enfoncer le clou, l'essai est clair et à la portée d'un néophyte que ces questions intéressent. Il faudra quand même approfondir quelques notions d'économie afin d'en mesurer la portée.

Un essai autorise la réflexion, il n'apporte ni certitude ni recette magique. Pour autant que l'on entende et entérine les recommandations de l'économiste français, inverser la vapeur par l'activation des quatre leviers du début de cet article semble relever d'une dynamique fortuite, conditionnée par un nombre considérable de dispositions propices mais aussi de réticences. Il appartient néanmoins à la politique d'ouvrir des perspectives et de rendre espoir

"Ce ne sont pas les marchés financiers ou les bureaucraties internationales
qui ont pris le pouvoir, c'est la politique qui a renoncé à exercer le sien." 

© Les dessins de Konk

14 commentaires:

  1. Une lecture bien sérieuse!
    Dans le film Demain (que je recommande) on rappelle l'exemple islandais, quand les gens ont refusé que l'on renfloue les banques en 2008; je crois que l'affaire n'est pas terminée.

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    1. Une lecture sérieuse : j'ai essayé d'en tempérer l'austérité par l'humour en dessin...
      "Demain", un film à voir, bonne idée de le rappeler, ballon d'oxygène et un beau pendant aux analyses économiques de N. Baverez.
      L'exemple de l'Islande est particulier et difficilement applicable à nos démocraties, me semble-t-il.
      Bon dimanche Keisha.

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    2. une île, 300 000 habitants, donc oui, assez particulier. plus une certaine indépendance énergétique

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    3. Vous êtes bien placée pour en parler...

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  2. lecture peut être un peu difficile pour moi mais le billet permet déjà de se faire une idée
    il est plus que temps de réagir en effet
    Comme Keisha je vous recommande le film Demain qui est à la fois signal d'alarme mais contient aussi des aspects positifs possibles

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    1. Bonjour Dominique, j'espère que le "farniente" vous a bien reposé, content de vous revoir ici en tout cas.
      Oui nous avons vu "Demain" et l'avons trouvé empreint d'espoir dont l'actualité et les prévisions ne sont pas porteur.
      Lecture un peu difficile, c'est un sujet compliqué, mais j'aime de temps en temps "me prendre la tête", vous savez bien... Et je vous assure que malgré cette lecture d'été sérieuse, je n'ai aucun examen à repasser en septembre ;-)

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  3. Je suis complètement d'accord sur la "lâcheté" ; j'ai déjà entendu ou lu tout ce que vous exposez dans votre billet. Parle-t'il quelque part de l'augmentation des inégalités ? La rigueur n'est pas portée de la même façon pour tout le monde. J'avoue ne pas avoir le courage de plonger dans ce genre d'ouvrage ; et j'écoute beaucoup d'émissions de radio sur ces thèmes-là, je ne pense pas avoir les compétences pour aller plus loin dans ce domaine.

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    1. Les inégalités : les libéraux pensent que, pour le bien-être de tous, pour l'ensemble du système économique, il est préférable que la croissance reparte, que l'économie redémarre avec des retombées positives (emploi, social) pour tous. L'impact social de l'austérité, la défense des démunis, l'accentuation des inégalités ne fait pas partie de leurs préoccupations premières. Je ne m'attendais pas à trouver cela chez Nicolas Baverez.

      Lorsque je fais ce genre de billet, le but est moins d'inviter à lire un tel livre que d'arriver à en tirer une synthèse qui se dégage bien lorsque je dois rédiger, relire des passages, etc... Bref j'en sais un peu plus sur le sujet, c'est mon but. Je crois que chacun a les compétences pour s'aventurer dans un tel domaine, vous y compris Aifelle, mais c'est énergivore. J'essaie d'aller assez loin pour être mieux outillé afin de me forger des opinions fondées et entendre/lire les propos des politiques.
      L'exploration des positions auxquelles on ne souscrit pas volontiers est pleine d'enseignement. Comme vous, j'ai entendu et lu tout cela en vrac dans les médias, j'en avais une idée confuse. Ici j'ai une ligne, une structure de base à laquelle je me référencerai à l'avenir.

      Bonne semaine Aifelle.

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  4. Je vous félicite et remercie à la fois. Je n'aurai pas le courage de le lire, mais vous en faites une belle synthèse qui nous éclaire déjà sur des pistes qu'on pourrait (si une quelconque volonté politique, un improbable courage s'y mettaient) à suivre.
    Beaucoup de mini initiatives individuelles ou de groupes réduits auront-ils une influence sur nos décideurs livrés aux marchés?

    Bonne semaine Christian.

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    1. Faisons notre possible individuellement, les ruisseaux font les grandes rivières, que resterait-il si l'on n'y croyait plus ?
      Bonne semaine Colette.

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  5. Merci de vos explications Christw, je comprends votre point de vue. Il peut s'appliquer d'ailleurs à pas mal d'autres sujets.

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  6. Bonjour Christw, même si je ne lis pas les livres sur l'économie, je note celui-ci car la matière m'intéresse. Il y a beaucoup à dire. Bonne journée.

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    1. Ah bien j'espère que vous y trouverez matière à réflexion. Je visiterai vos bons conseils cinéma prochainement à notre retour de vacances, quand la passion des salles nous reprendra... :-)

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