R. Burgin: Pensez-vous qu'un livre comme Ulysse, par exemple, soit une tentative destinée à montrer l'ensemble de l'éventail de la pensée ?
J. L. Borges: Oui, mais à mon avis Ulysse est un échec. Quand on arrive à bout, on connaît des milliers et des milliers de circonstances dans la vie des personnages, mais on ne les connaît pas eux-mêmes. On n'y pense pas comme à ceux des livres de Stevenson ou de Dickens: chez Stevenson par exemple, des personnages peuvent apparaître sur une seule page mais vous avez l'impression de les connaître, ou qu'il y a plus long à en savoir à leur sujet, tandis que Joyce nous fournit des milliers de détails sur eux. On sait qu'ils sont allés deux fois aux toilettes, les livres qu'ils ont lus, leurs poses exactes quand ils sont assis ou debout, mais c'est superficiel. On dirait que Joyce passe dessus avec un microscope ou une loupe.
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