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Sophia Éditions, 273 pages |
Présentation officielle (exempte d'humeurs personnelles)"Le seul annuel à compiler tous les évènements automobiles de l’année, sur les plans industriel, sportif et culturel. Industrie, compétition, création : tels sont les maîtres mots de L’Année Automobile, qui aspire depuis 1953 à mettre en valeur la dimension humaine du monde de l’automobile, et à décrypter les évènements marquants de l’année.
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"L'année automobile" est une publication luxueuse annuelle que j'ai surtout prisé dans les années 1964 à 1972. Elle représentait le summum de la saison auto en version papier, pour nous (frère et copains de classe) qui suivions assidûment les courses et les développements des bolides. La toute première édition de cette perle des beaux livres, pour les amateurs du genre, remonte à l'année 1954-55 et est quasi introuvable.
Je me souviens des photos doubles-pages où l'on contemplait Jacky Ickx décollant des quatre roues dans sa Brabham F1 sur les bosses du circuit du Nürburgring. Bref, pour nous, ce beau volume était comme le précipité de nos rêves d'adolescents et jeunes adultes. Le cadeau idéal.
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Jacky Ickx vainqueur du GP d'Allemagne 1969. |
Eh bien, c'est fini. Outre le fait que mon adolescence n'est plus, la plus grande photo de voiture du dernier volume mesure tout au plus 18 x 13 cm. Pire : les grands formats pleine-page sont réservés à des personnalités du monde automobile : Luca de Meo (président des constructeurs européens), Denis Le Vot (Dacia), Bruno Sacco (Styliste Mercedes), Urs Kuratle (Directeur technique Porsche Motorsport), Adrien Fournaux (pilote rallye français), et, last but not least, un quidam très smart qui lit pendant que sa voiture autonome conduit.
Ces grands portraits enlèvent, à mon avis, ce qui faisait la magie des anciens numéros de "L'Année automobile". Certes le livre, très français, est plus touffu qu'auparavant et exhaustif. Mais pourquoi tant d'espace illustré pour les cadres plutôt que pour les machines ?
Seul Adrian Newey (Ingénieur course successivement chez Williams, Mc Laren, Red Bull, Aston), considéré comme un des génies de la F1 depuis 25 ans, me semble avoir sa place dans cette glorieuse galerie.
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Adrian Newey, ingénieur F1 |
Sont proposés des dossiers rétros qui m'ont vraiment accroché : "Le Grand Prix de l'A.C.F." (il y a cent ans) [p.124] avec une illustration d'un duel Alfa-Bugatti de Walter Gotschke ; "Lancia Stratos, une nouvelle ère" (il y a cinquante ans), retour sur le concept et l'architecture de cette sportive futuriste ; Facel Vega (il y a 70 ans), une voiture française [laide, mais prestige tricolore], étoile dans le ciel du haut de gamme.
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Duel Bugatti-Alfa lors du GP ACF 1924 (Walter Gotschke)
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Viennent encore un dossier sur le circuit de Monthléry, inauguré il y a cent ans et une exposition Bugatti à Uzès : ces vieux engins ont une classe folle – je me vois bien, moustache et casquette à carreau au vent, (dé)filant au volant de l'un d'entre eux.
J'ai, en outre, trouvé plein de chaleur et de finesse dans le chapitre consacré aux décoratrices de voitures. Créativité féminine que concrétisent de très belles photographies. [p.260 et suiv]
En fin de volume, le top 10 des ventes aux enchères [p.270] met en exergue Ferrari avec la 250 GTB spyder California, classée première (1960, achetée 15.349.500 €), ou la Berlinetta (1962, acquise pour 5.530.000€).
Structure du livre :
- Industrie (économie, production, création) [p.16 à 106]
- Sport (Formule 1, Endurance, rallye) [p.112 à 228]
- Culture (instants d'année, dossiers rétros, exposition, arts plastiques, le marché de la collection, le top 10 des ventes aux enchères) [p.232 à 270]
Une moitié donc consacrée à la compétition auto, l'autre moitié fait la part belle à l'industrie, soit un tiers du volume.
Économiquement, la voiture à moteur thermique a toujours le vent en poupe dans "L'année automobile 2024-25", et, hormis les brèves description des modèles électriques marquants sortis durant l'année, guère trace d'un dossier conséquent sur la technologie électrique/hybride, ni sur le championnat de Formule E (électrique).
La transition écologique est abordée dans un article de fond [p.20]. On y lit : "Les incertitudes sur la vitesse d'évolution de la transition écologique ont pesé négativement sur les marchés". Marchés, croissance, on ne sort pas de l'éternelle ritournelle.
Anecdotique mais signe des temps, en balade à la mer du Nord, j'ai vu ce sticker sur la calandre d'un gigantesque SUV :
Bref, moins de magie, mais un livre très axé sur la France, qui suit son époque, très soucieux de la santé financière de l'industrie automobile. Reste que le sport auto, qui a tant changé (on « réinitialise » une voiture de course comme un ordinateur), continue, paradoxe épineux, à me faire rêver, comme tous les grands enfants qui oublient, temporairement, leur vœu de protéger la planète.
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Merci à Babelio (masse critique) et aux excellentes "Sophia Éditions" pour lesquelles « beau livre » n'est pas une expression vaine.