18 décembre 2012

La comtesse est nue

(...) : la vie de l'écrivain n'est pas exceptionnelle, mais que lui soit exceptionnel fait que son ordinaire est extraordinaire. Cioran s'asseyant tous les jours sur le même banc du jardin du Luxembourg, ce banc change de nature. Vert, bien sûr, mais d'un vert, comment dire, littéraire.   
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Nous l'avons assez dit, la littérature permet de s'évader de l'univers familier. Nous l'avons dit presqu'autant de fois que nous avons dit aimer les personnages qui nous ressemblent.
La littérature c'est l'évasion. Que les détenus ne lisent pas davantage est une énigme.
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La seule certitude anthume est conférée par les prix importants, le Nobel et le Goncourt. Cela fait deux élus par an, deux cents par siècle. C'est peu, et certains voudraient ajouter le prix Renaudot comme label de qualité éternelle. La requête sera examinée, mais que les choses soient claires: au cas où elle serait satisfaite, on n'ira pas au-delà. Il en va de cette limite comme de la question de la Turquie dans l'UE: si on l'autorise, jusqu'où ira-t-on ? Aux Philippines ? Imagine-t-on un Manille-Bayern en finale de la coupe d'Europe ? Rien qu'en France, 132 prix littéraires ont été attribués en 2010. Encore quelques années d'inflation comme ça et les prix n'auront plus aucun prix.
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La littérature est une comtesse dont les gueux de la modernité ont arraché la parure intimidante, puis le derme idéologique. Ne reste que l'os. Ne reste que l'œuvre.            

François Bégaudeau - Tu seras un écrivain mon fils (Bréal)

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