16 décembre 2013

Le talent du lecteur


JP Stroobants: Croyez-vous que des francophones pourront réellement pénétrer ce livre ; ce pays «tellement proche et tellement inconnu» comme l'écrit votre éditeur parisien ? La Flandre reste mystérieuse à Liège ou à Paris, alors que via le roman, on semble percevoir facilement ce qui se passe aux États-Unis, en Amérique latine ou en Union Soviétique... 

Hugo Claus: Je ne peux qu'espérer qu'on comprendra ce livre à Paris ou à Liège. Pourquoi sommes-nous à même de pénétrer dans les univers que vous citez ? Simplement parce que quelqu'un qui a du talent ou du génie est capable de nous y amener. La différence entre un écrivain régionaliste des Ardennes et Faulkner réside simplement dans ce talent-là. En principe pourtant, les choses sont pareilles : chacun écrit sur ses gens à lui, dans un genre semblable. Ce qui distingue les uns des autres, c'est la vision et la façon de traduire. C'est peut-être l'attrait d'une autre civilisation qui pourrait pousser les Liégeois à me lire. Sans plus. En tous cas, j'ai veillé à ne pas m'enliser dans l'hermétisme ou la description folklorique.

JP Stroobants: Précisément, on vous a reproché cet hermétisme...

Hugo Claus: Je peux apparaître hermétique à certains moments, sauf bien sûr à moi-même et à quelques fidèles.. Ici, je répète, j'ai fait attention à ne pas ennuyer. Mais bien entendu, le lecteur doit parfois avoir du talent...

Extrait d'un entretien dans Le Vif L'Express Extra n°15, 2013, paru en 1985 à l'occasion du livre Le chagrin des Belges (Het verdriet van België) (Juliard, 1985)  

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