"Mais une chose encore doit retenir l’attention ; c’est l’expression qu’emploie Goering, cette menace de fondre sur l’Autriche. On lui colle aussitôt des images terrifiantes. Mais il faut rembobiner le fil pour bien comprendre, il faut oublier ce que l’on croit savoir, il faut oublier la guerre, il faut se défaire des actualités de l’époque, des montages de Goebbels, de toute sa propagande. Il faut se souvenir qu’à cet instant la Blitzkrieg n’est rien. Elle n’est qu’un embouteillage de panzers. Elle n’est qu’une gigantesque panne de moteur sur les nationales autrichiennes, elle n’est rien d’autre que la fureur des hommes, un mot venu plus tard comme un coup de poker. Et ce qui étonne dans cette guerre, c’est la réussite inouïe du culot, dont on doit retenir une chose : le monde cède au bluff. Même le monde le plus sérieux, le plus rigide, même le vieil ordre, s’il ne cède jamais à l’exigence de justice, s’il ne plie jamais devant le peuple qui s’insurge, plie devant le bluff."
Éric Vuillard - L'ordre du jour
Éric Vuillard - L'ordre du jour
Source Sutori.com |
Bonjour Christw, merci pour cet extrait d'un récit qui m'a plu. J'ai lu pas mal de billets assez négatifs sur les blogs que je consulte. Je peux comprendre les réticences. Personnellement, j'aime beaucoup le style de Vuillard. Bonne journée.
RépondreSupprimerJe n'ai guère consulté les avis sur les blogs, j'ai retrouvé le Vuillard que j'apprécie dans ses précédents ouvrages. Ce n'est pas mieux (ni moins bien) parce que c'est le Goncourt.
SupprimerJe me demande si les avis négatifs ne viennent pas de ce que les gens attendent une histoire, or c'est plutôt une réflexion SUR l'Histoire.
Bonne journée Dasola, à bientôt.
Ce n'est pas rassurant ... je crois en effet qu'un certain nombre de lecteurs attendaient un style plus romanesque. Je le lis comme un livre d'histoire et ça me va.
RépondreSupprimerSi vous y trouvez de l'intérêt, et peut-être un goūt pour la manière littéraire de l'auteur, c'est le principal.
SupprimerDernière phrase retentissante... pour notre époque aussi.
RépondreSupprimerBluffs de Trump pour les caméras, bluff (?) de Kim Jong-un...
SupprimerA propos de la "gigantesque panne de moteur sur les nationales autrichiennes", l'armée allemande n'est pas tout à fait prête techniquement pour la "guerre éclair" en 1938. Jacques R. Pauwels explique dans son livre "Le big business avec Hitler" "comment une grande partie du matériel roulant et volant de l'armée allemande fut fabriquée par les filliales de General Motors et Ford" en 1939-40. L'usine Ford de Cologne à tournée de 1939 à 1945...Le soldat français, assez mal équipé (et trahi par l'essentiel des cadres de notre armée) ne s'imaginait pas que les camions, panzer, avions qui ont déferlé à vitesse grand "V" à travers la Belgique et les Ardennes étaient équipé de moteurs Ford, d'huile, de carburants (Texaco), caoutchouc américain et même l'alu des avions. Aprés l'entrée en guerre des USA en décembre 1941, cette fourniture va considérablement diminuer (mais pas totalement, certaines firmes commercerons jusqu'en 45 par des pays neutres) et précipitera la chute de l'Allemagne à court de ressources face à la Russie.
RépondreSupprimerInformations rarement précisées sur les conséquences de l'entrée en guerre des États-Unis !
SupprimerSa guerre éclair en la Russie ayant échoué, Hitler à déclaré la guerre aux Américains pour forcer les Japonais à ouvrir un front contre les russes...Le Japon à refusé et au printemps 42 les élites savaient que l'Allemagne allait perdre, les pétainistes "frileux" commencèrent à retourner leurs vestes.
SupprimerRobert Spire.
La non-intervention du Japon sur le front russe a suscité une fameuse colère de Hitler. Je lis pourtant sur wikipédia que "l'Ambassadeur japonais Ōshima n'a jamais fléchi dans sa conviction que l'Allemagne sortirait victorieuse".
SupprimerPearl Harbor, 7 décembre 1941. Hitler déclare la guerre aux USA le 11 décembre. La proximité des dates n'est pas un hasard. La décision d'Hitler est encore un coup de bluff car les accords germano-japonais existants ne l'obligeaient pas à se ranger aux côtés du Japon. Hitler à dû penser que les Japonais reconnaissants lui rendraient "la politesse" en déclarant la guerre à la Russie. Pari perdu et la guerre avec... malgré Pearl Harbor et la déclaration de guerre, les trusts américains ont continué leurs affaires avec l'Allemagne via la Suisse, l'Espagne, la Suède ce qui a rallongé certainement le temps de guerre. Se sont les politiques, Roosevelt en tête qui prirent la décision d'aider Staline à cause principalement du génocide des juifs. On sait qu'Henri Ford a détruit quantités d'archives compromettantes, qu'il y avait un bureau d'IBM (Hollerith Abteilung) dans chaque camps de concentration et d'extermination. Coca Cola fournira (sous le nom de Fanta) jusqu'à la fin de la guerre une boisson au goût orange, des millions de caisses! Même dans les fameuses fusées V2, les turbines sont de Ford, le moteur de l'avion à réaction allemand était de fabrication Général Motors. À la fin de la guerre on comprend pourquoi l'élite technicienne allemande est repartie dans les bagages des américains, fallait pas que cela tombe dans les mains russes.
RépondreSupprimerRobert Spire
CQFD : l'implication du capitalisme américain.
SupprimerJe suppose que vous tirez ces informations du "Big business avec Hitler" de Pauwels. Je vais me le procurer.
Oui bien sûr mais aussi d'autres historiens qui ont étudié de prés le capitalisme américain mais pas que lui. Pour les capitalistes, vous le savez, l'ennemi était le bolchévisme. Le contexte de l'époque a fait qu'ils ont du se débarrasser en premier des hégémonies impériales nazie et japonaise, rivales plus dangereuses pour celle des anglo-saxons. La fin du communisme viendra plus tard aprés moult péripéties.
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