D'une branche sur l'autre, la goutte de pluie
tombe et la feuille en dessous ploie ; le jour
se creuse affaibli par les crues du printemps,
comme nos joues et nos épaules et notre joie.
Inadaptés, voilà bien ce que nous sommes,
nous avons beau gémir, plier le genou, caresser
les statues, le temps nous use. Cette goutte
qui tombe, cette autre qui la suit le long
de la branche, comment ne pas y voir
de la branche, comment ne pas y voir
le trajet de toute vie, comment ne pas poser
la seule question qui tremble au fond des yeux
comme une prière : la feuille qui nous recevra,
si elle existe, sera-t-elle douce comme une main
amie, douce assez pour ne rien regretter ?
Guy Goffette - Le Trajet (du recueil Pain Perdu)
Sur la branche ou la vitre, la goutte coule en vers irréguliers. Il y a plus d'amertume et de mélancolie que de coutume chez ce Goffette-là, m'a-t-il semblé, mais celles-ci ne sont-elles pas bienvenues quand le beau s'y accorde ? Et lorsque la grisaille nous enveloppe, ne somme-nous pas contents d'en trouver des reflets dorés sur le chevet ?
Qu'il est beau ce parallèle de trajets de vie, cet espoir sous forme de souhait final.
RépondreSupprimerUn superbe poème de Goffette, merci merci de nous l'offrir.
En espérant que vous allez bien Christian, je vous envoie soleil et coups de vent.
Merci pour votre soleil chaleureux, Colette, bon long week-end !
SupprimerJe le crois sincèrement que la feuille qui nous recevra sera douce. Merci pour ce poème de Goffette. Vraiment, merci. Bonne journée.
RépondreSupprimerBien que je ne sois pas aussi confiant que vous, comme Goffette d'ailleurs, j'apprécie grandement lire votre sincère conviction. Merci, vraiment, de la partager.
SupprimerTrès sensible à ces vers de Goffette, aux enjambements devenus embranchements.
RépondreSupprimerLe temps nous use, oui, mais affûte le regard (qui s'arrête un instant sur les vitres perlées de pluie). Bonne après-midi.
Je me pose souvent la question : pourquoi présenter les textes «en vers» avec des enjambements/embranchements pas toujours évidents. Ici, oui, pour les à-coups de la goutte de branche en branche, mais plusieurs «poèmes» du recueil m'ont paru ne pas gagner à être présenté de la sorte. Il faut sans doute trouver une raison dans l'expression orale.
Supprimer(J'évite d'user de l'horrible mot "récitation", je revois les trous sur l'estrade).
Bonne journée.