21 avril 2017

Le palais des livres


La quatrième de couverture décrit exactement cet essai promenade : "En prenant des chemins quelque peu buissonniers, par exemple en allant voir quelle place les écrivains donnent aux faits divers, aux délices et aux affres de l'attente, à la tentation de l'inachevé, aux rapports entre vie privée et écriture, à la façon d'écrire l'amour, ces essais adoptent tout naturellement la revendication de Baudelaire sur le droit de se contredire. Et ils aboutissent à deux questions : Qu'est-ce qu'écrire ? Écrire est-il une raison de vivre ? L'une et l'autre, on s'en doute, ne peuvent que rester sans réponse.

Le palais des livres – je vous l'accorde, le titre est ridicule – s'accorde le droit de la contradiction car l'exhaustivité dont essaie de faire preuve Roger Grenier l'amène tout naturellement à citer des auteurs et des œuvres dont les démarches et avis s'éloignent ou s'opposent, ce qui confère au livre, à ses multiples citations et anecdotes, à cette énumération de belles références, les allures d'essais informels. Le flâneur y picorera quelques citations qui font mouche, l'idéaliste s'interrogera sur ses certitudes à propos de sujets plus ou moins importants, tels que la nouvelle ("Une demi-heure chez le dentiste"), l'œuvre et la vie privée, le suicide ("S'en aller") ou les sources d'inspiration littéraires les plus banales ("Le pays des poètes"). Ayant connu personnellement beaucoup d'auteurs et lu beaucoup – il est presque centenaire – Grenier apparaît certes comme un érudit mais il est facile à lire. L'amateur de littérature accueille ce recueil comme une friandise. 

Roger Grenier, bourré d'anecdotes (jugez de sa bibliographie), offre ici neuf textes, pour certains des écrits remaniés déjà publiés dans "La nouvelle revue de psychanalyse" et "La revue des sciences humaines". Mon regret est de ne pas disposer d'un index qui facilite le retour aux auteurs et à leurs nombreuses citations [l'informaticien grince et rappelle que les versions numériques permettent toujours, même sans index, des recherches rapides]. 

Sur Lecture/Écriture
, un avis tiède qui y a vu un propos ronronnant sans surprise. Si c'est un peu vrai, j'ai trouvé ce ronron non dénué d'acuité.
Autres points de vue : Le bouquineur " le dit passionnant et fait "pour ceux qui aiment entrer dans la cuisine des écrivains" et La cause littéraire conclut "un chapelet de perles, un infini respect".

Deux citations pour terminer, aux extrêmes :

"Je tiens pour plus important d'écrire un livre que de gouverner un empire. Et pour plus difficile aussi." (Robert Musil)

"Well, son, I can't drink all the time, I can't eat all the time, and I can't fuck all the time. What else is there to do ? " (Faulkner, à un journaliste – il ne les aimait pas)

15 commentaires:

  1. Déjà noté dans mes listes, peut être suite à l'avis du bouquineur?

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    1. Peut-être ?
      Grenier a produit d'autres livres du même genre, j'aimerais lire ses "Instantanés". Comme dit Assouline à Grenier, « Il n’y a plus que toi qui a connu… ».

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  2. Peut-être. J'aime beaucoup "Regardez la neige qui tombe", son bel essai sur Tchekhov, et j'ai lu aussi "Les larmes d'Ulysse" sur la perte de son chien.

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    1. Il est grand amoureux de Tchekhov, il y a beaucoup à découvrir chez ce vénérable connaisseur. Il insiste sur Pascal Pia qui, très talentueux, voulait rester silencieux.
      Je n'en resterai pas là, c'est bien de me conseiller ces titres.

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  3. j'aime ce genre de livre donc j'ai aimé celui là même si dans le genre je n'ai pas trouvé qu'il sortait vraiment de l'ordinaire, je suis d'accord avec l'idée d'un certain ronronnement
    je viens d'acheter le dernier Gilles Lapouge qui est de la même famille et que j'apprécie beaucoup même si je n'aime pas tous les écrivains qui sont dans son panthéon (Maupassant, le Sergent Bourgogne et Marguerite Duras, un titre à rallonge)

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    1. Les personnes qui participent à la rédaction de "La quinzaine littéraire" ne sauraient me décevoir. Je sais toutefois peu de Gilles Lapouge et vous faites très bien de me le signaler.

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  4. J'aurais envie de le lire plutôt comme vision d'une époque ; le monde littéraire qu'il a connu a dû changer, encore que la nécessité (ou pas) de l'écriture doit traverser les siècles. J'ai toujours beaucoup apprécié Gilles Lapouge dans ses émissions sur France-Culture.

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    1. Je n'ai pas trouvé que les considérations de Roger Grenier à travers de "vieux" auteurs étaient le reflet d'une époque passée, même si, c'est vrai, on peut regretter que le monde littéraire ait subi une évolution trop commerciale.

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  5. deux avis qui parlent de "ronron" ça me refroidit un peu mais je suis à la recherche de nouvelles pour mes lectures à haute voix alors?

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    1. Si vous cherchez des nouvelles, Grenier est un des rares auteurs français a en avoir écrit beaucoup. Dans le livre il cite Flannery O'Connor dont il admire la maîtrise dans ce genre. Je ne me prononce pas car je n'ai rien lu d'elle, pas plus que, jusqu'ici, de nouvelles de Roger Grenier d'ailleurs.

      Le ronron vous refroidit ? Personnellement c'est dans cet état que me viennent mes plus beaux éclairs de lucidité (càd les réflexions que je considère vaniteusement comme telles)... :-)

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    2. Connaissez-vous les nouvelles de G-O Châteaureynaud ?

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  6. JE l'éviterai donc, ce qui va faire plaisir à ma PAL

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    1. À vous de voir, c'est toutefois un bon livre.

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  7. Roger Grenier : beaucoup aimé son livre sur Tchekhov, au titre merveilleux, qu'évoque Tania. Moins "Les larmes d'Ulysse".
    Gilles Lapouge, j'aime tout ainsi que GOC.

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    1. J'ai en attente un recueil de nouvelles de GOC (Singe savant...), pas encore eu vraiment le temps de l'aborder.
      Bizarrement je trouve peu de Roger Grenier en rayons de la bibliothèque publique, on déplace souvent en réserve des auteurs moins empruntés me semble-t-il, faute de place. Il faut alors faire des demandes particulières, avec délais d'attente.

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