"Certains chroniqueurs présument que Simon Bacamarte n'agit pas toujours avec une entière honnêteté ; ils versent au dossier certaine pièce, dont je ne sais si elle est recevable : Simon Bacamarte, allèguent-ils, aurait réussi à faire voter par le Conseil une ordonnance autorisant le port d'un anneau d'argent, au pouce de la main gauche, par toute personne déclarant, sans autre forme de procès – production d'un document ou consensus général –, avoir dans les veines deux ou trois onces de sang bleu. Le but inavoué de cette démarche n'aurait été autre que d'assurer la fortune d'un orfèvre, compère et ami du médecin.
Quoi qu'il en soit, et négligeant le fait que l'orfèvre en effet, à la suite de cette démarche vit gonfler substantiellement ses revenus, le plus saillant en cette affaire est que le nombre des hôtes de la Maison Verte crût de plus belle, et décider de l'objectif véritable de l'illustre médecin serait téméraire. Quant à la raison justifiant la mise à l'ombre de tous ceux qui utilisèrent ledit anneau, c'est là un point parmi les plus obscurs de toute l'histoire d'Itaguaï ; l'explication la plus couramment reçue est que ces gens furent emmenés parce qu'ils déambulaient et gesticulaient inconsidérément dans les rues, chez eux ou à l'église. Et les fous, comme chacun sait, gesticulent beaucoup."
J. M. Machado de Assis - "L'Aliéniste" (Métailié, 1881)
Traduit du portugais (Brésil) par Maryvonne Lapouge-Pettorelli
Traduit du portugais (Brésil) par Maryvonne Lapouge-Pettorelli
Tu me donnes envie de le relire...
RépondreSupprimer:-)
SupprimerNe te prive pas, c'est amusant et intelligent.