8 mars 2022

De la part de " sœurette "


"Des monts et merveilles" n'est ni roman, ni biographie, ni poésie, tout ça à la fois peut-être, c'est un livre inclassable, hybride, dont les lignes directrices ont objectivement peu qui les unit. Sinon ce frère regretté, qui, en promenade sur un quai de Liège, indique à sa sœur l'endroit où séjourna Napoléon Bonaparte en 1803 et 1811, avec deux femmes différentes : l’hôtel de Hayme de Bomal. En ferait-on un livre ? Isabelle Spaak s'y lance avec le vœu de célébrer la mémoire de Michel, esprit fantasque, fidèle épistolier qui se posa un jour à Liège. Entre les lettres du frère, elle revient sur les épisodes liégeois de Napoléon, enquête opiniâtrement sur les épouses Marie-Louise et Joséphine, non pour traquer la grande Histoire mais les inventaires, détails vestimentaires, livres de compte, toutes choses qui donnent au passé historique une matière palpable, presque organique : le quinquina dans l'armoire à pharmacie de la duchesse de Parme s'émietterait presque entre les doigts du lecteur... 
"Si tu savais Michel, jusqu'où notre promenade m'a menée. Liège, Parme, Paris, Fort-de-France. Fonds d'archives, bibliothèques, musées, maisons diverses et variées. J'y ai traqué un signe, cru percevoir des présences."

"À l'époque de ma balade à Liège avec Michel, le sort de ces deux femmes – Joséphine et Marie-Louise – m'apparaît très moderne à cause de ce divorce." Le divorce, celui de sa mère qui se sépare du père de Michel et se remarie avec celui qu'elle tuera d'un coup de fusil, avant de se donner la mort. Le vieux drame ressurgit en quelques lignes, un rapport de police. Deux maris, deux épouses, peut-être un motif d'approcher les deux femmes de Napoléon, mais le liant est le frère affectueux, voix off aux accents surréalistes : ses phrases désinvoltes sont poésie, Isabelle y applaudit et les donne, larme au bord des mots. 

On oubliera le grainier Humblot (Humblet, une institution ici) et le quartier de Cointre (Cointe) pour l'agrément pris à ce chapelet de belles digressions servies par l'écriture positivement laconique d'Isabelle Spaak. 

Et l'hommage à ce fraternel affectueux.

"Rives dépeignées de la Meuse, lestes bleuets et fragiles coquelicots, surprises, rires.
La vie en chansons, la vie en balades, la vie en baisers.
Liège n'est pas le paradis, mais le paradis se révèle parfois à Liège.
Je t'aime Isabelle, autant qu'un frère peut aimer."

Merci à Babelio et aux Éditions des Équateurs

Couverture : Après-midi à Fiesole de  Baccio Maria Bacci (Galerie des Offices, Florence)

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