La description d'actes et décisions ordinaires comme chacun les vivrait et les verrait, un quotidien un peu nonchalant, un certain abandon aux événements, cela crée une familiarité – une amitié peut-être ? – avec le récit de moments essentiellement anecdotiques. Un je sans façons – qui ne cherche pas à se montrer à son avantage, veux-je dire – y est pour une part sans doute, mais pas seulement. Le sens couvert de quelques phrases remonte aisément à soi, à sa propre existence, un presque vécu qui finit par induire que, dans ces pages, c'est un peu soi qui pourrait agir – ou, irrésolu, ne pas agir comme il siérait. Certains peuvent se demander où l'on veut en venir, que c’est léger ; je n'ai pas pensé cela un seul instant alors que je cheminais vers Nice et Bastia avec les trois hommes seuls. Il se peut que j'aie une belle confiance en l'auteur dont les précédentes lectures m'avaient souri.
Puis les événements se font plus singuliers : Marc croit reconnaître une femme sur l'autoroute, dans un break Ford bleu marine, celle qu'il n'ose aborder dans le métro ; l'ex-funambule Cyril fait du fil dans sa chambre à même le sol ; et Serge se trouble de ce que Marie semble avoir refait l'arrête de son nez. Je ne vais pas spoiler, il faut lire ce beau récit jusqu'à la dernière ligne.
N'oublions pas ce clin d'œil dans la narration : "Je me couchai assez vite avec un livre dont j'échouai à capter l'argument, dilué qu'il était dans une suite d'anecdotes parfaitement rendues mais que je reliais mal entre elles, en grande partie par ma faute, il est vrai, la difficulté de ma lecture s'accusant avec l'émergence de ma pensée pour Marie, qui grandissait dans le silence." Amusante proposition auto-réflexive (multiple) qui, sitôt repérée, confirme qu'on est en phase avec l'auteur.
Un auteur Minuit que je n'ai pas lu? Vite, il me faut rattraper cela; j'aime bien la phrase auto-réflexive, on peut dire clin d'oeil au lecteur, non, ^_^
RépondreSupprimerCe clin d’œil était facile à voir, vraiment un appel du pied.
SupprimerDans la même idée, jai appris après lecture d’Éric Laurrent (”Clara Stern”) qu’il faisait régulièrement des références à de grandes œuvres littéraires: à ma grande honte, rien vu :-(
Pour justifier l'utilisation du terme «auto-réflexive», si l’on suit le lien attaché (compte-rendu du "Méridien de Greenwich" d’Échenoz), on y trouve plus d’informations sur le sujet.
SupprimerLe clin d’œil au lecteur peut être direct, sans ambiguïté. Le procédé d’auto-réflexion est plus subtil, la phrase porte en même temps sur l’action du livre que sur le texte qui la porte. Cela peut passer complètement inaperçu, ce qui en fait le charme. Dans la phrase signalée chez Oster, il y a, en outre, mise en abyme, puisque le livre que tient le personnage Serge semble être le livre qu’on lit.
Merci d'avoir écrit par ailleurs, je reviens cependant ici. J'ai lu le lien vers auto réflexive, trouvé Echenoz (un roman pas lu)(pourtant j'ai dévoré ses romans) et même si je ne 'vois' pas tout, j'ai du plaisir à le lire (je comprends que certains bloquent)
RépondreSupprimerEt je découvre que Laurrent est présent plusieurs fois à la bibli, quel bonheur. Mais je doute de saisir toutes les références.
J'ai trouvé Laurrent un peu trop maniéré, dans "Clara Stern". Pour moi, c'était irritant, même dans les premières pages.
SupprimerJe n'ai rien lu d'autre de lui, vous verrez bien.
Merci, je note cette référence, qui est disponible chez moi à la médiathèque !
RépondreSupprimerJean-Michel
Bonne lecture ;-)
SupprimerVoilà qui est fait. Un excellent moment, assez intrigant. Merci.
SupprimerMerci pour le retour, bonne journée Jean Michel.
SupprimerUne note de lecture est en préparation, peut-être la publierai-je chez Textures ;-) A bientôt cher Christian,
SupprimerJean-Michel
Bonne idée ! J'irai voir :-)
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