27 septembre 2024

Trancher le nœud

Le nœud de vipères - François Mauriac
(1932)
À chacune de mes lectures de François Mauriac, ressort l'un de mes importuns paradoxes qui consiste à apprécier ses romans, alors que je me complais généralement chez des écrivains, moralistes ou penseurs qui naviguent aux antipodes des idées platoniciennes et religieuses de l'académicien français. 
Dois-je m'alarmer ? Je me targue seulement de partager ce que je lis, sans chercher à m'approprier ou promouvoir – à quel titre d'ailleurs ? – telle éthique ou philosophie, serait-ce au sein d'un blog qui met résolument en avant certaines d'entre elles parmi les plus immanentes. Et dans ce blog qui vit et respire au fil du temps et des pages, libre respiration qui s'accommode de la contradiction, quelle inconsistance y aurait-il à s'attacher un personnage de fiction qui ne veut plus du sacerdoce de l'avarice, de la haine familiale et du ressentiment pour se découvrir un cœur qui le porte à la foi chrétienne ?

Si les subjonctifs imparfaits ne vous irritent pas, ni l’austérité du ton, ce sont deux cent cinquante pages en Livre de Poche qui méritent le détour.

"À travers la vitre où une mouche se cogne, je regarde les coteaux engourdis. Le vent tire en gémissant des nuées pesantes dont l'ombre glisse sur la plaine. Ce silence de mort signifie l'attente universelle du premier grondement. « La vigne a peur ... » a dit Marie, un triste jour d'été d'il y a trente ans, pareil à celui-ci. J'ai rouvert ce cahier. C'est bien mon écriture. J'en examine de tout près les caractères, la trace de l'ongle de mon petit doigt sous les lignes. J'irai jusqu'au bout de ce récit. Je sais maintenant à qui je le destine, il fallait que cette confession fût faite ; mais je devrai en supprimer bien des pages dont la lecture serait au-dessus de leurs forces. Moi-même, je ne puis les relire d'un trait. À chaque instant, je m'interromps et cache ma figure dans mes mains. Voilà l'homme, voilà un homme entre les hommes, me voilà. Vous pouvez me vomir, je n'en existe pas moins.[p.167]

 

4 commentaires:

  1. Je comprends la sorte de fascination ressentie à la lecture de cet auteur. Ah ces subjonctifs! Mais quelle étude de l'Homme.

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    1. Vous dites avec d'autres mots ce que je pense de Mauriac.
      Eh oui, ces subjonctifs, ils font un peu précieux aujourd'hui.
      Bonne journée.

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  2. alors là je cale , Mauriac est un auteur que j'ai lu bien entendu mais sans aucun plaisir, il y a chez moi quelque chose qui m'indispose vis à vis de l'auteur, je n'aime pas ses personnages, la trame de ses romans. bref j'aime pas
    En ce moment je suis plongée dans les livres sur le conflit Israélo palestinien

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    1. Il est vrai qu'il peut indisposer par une austérité, un sérieux rebutants. Le soin apporté à l'élaboration des personnages et de leurs rapports me le fait apprécier. Et ceci, comme précisé plus haut, sans aucune considération de foi religieuse.

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