Traduit de l'anglais par Gabrielle Rolin
Ma première crainte à l'issue de la présentation du roman (Charles Dantzig) était de buter sur les maladresses d'un roman de jeunesse, Truman Capote l'aurait écrit dans les vingt ans, préférant le laisser dans l'ombre par la suite. L'autre appréhension était liée à cette réplique de Gore Vidal, donnée par Dantzig, dans la guerre de chats que se livrèrent les deux écrivains gays : "Capote, je ne peux pas le lire car j'ai du diabète" : alors, "La traversée de l'été", un roman confiture?
S'il y a des lourdeurs – Dantzig les nomme "images tapageuses" et donne en exemple "un silence qui circula comme un oiseau blessé" à côté d'étincelles telles "un lit grand comme un nuage" – il s'agit d'un roman dramatique plein de finesse psychologique où se reconnaît l'auteur des réussites à venir : Grady, dix-sept ans, la bonne société, restée seule dans le New York des années quarante alors que ses parents voyagent en Europe, tombe amoureuse d'un gardien de parking et connaît une saison vibrante. Les personnages féminins de Capote sont magnifiques, avec une mention pour la furtive Anne, passionnée de moteurs et clés à molette, quelques pages si vivantes avant de se casser bizarrement la nuque.
Le hasard a voulu qu'on retrouve le manuscrit en 2004, ainsi que le raconte Alan U. Schwartz, ami et avocat de Capote chargé d'administrer ses droits littéraires : "... ce n'était pas une œuvre aboutie, mais elle témoignait de l'émergence d'une voix originale et d'un écrivain au talent aussi étonnant qu'efficace". Cette postface évoque quelques moments émouvants où l'écrivain, au bout du rouleau, supplie Schwartz de le "laisser partir". Il demeure manifeste qu'avec cette détresse, la littérature américaine a manqué des œuvres potentielles majeures, dont nous retrouvons les prémices du style dans "La traversée de l'été".
Nous nous contenterons de ce qu'il nous a laissé : j'espère lire "Prières exaucées" dont l'une des nouvelles, où certains de ses amis furieux se reconnurent, participa de la disgrâce et du déclin de l'artiste.
Ma première crainte à l'issue de la présentation du roman (Charles Dantzig) était de buter sur les maladresses d'un roman de jeunesse, Truman Capote l'aurait écrit dans les vingt ans, préférant le laisser dans l'ombre par la suite. L'autre appréhension était liée à cette réplique de Gore Vidal, donnée par Dantzig, dans la guerre de chats que se livrèrent les deux écrivains gays : "Capote, je ne peux pas le lire car j'ai du diabète" : alors, "La traversée de l'été", un roman confiture?
S'il y a des lourdeurs – Dantzig les nomme "images tapageuses" et donne en exemple "un silence qui circula comme un oiseau blessé" à côté d'étincelles telles "un lit grand comme un nuage" – il s'agit d'un roman dramatique plein de finesse psychologique où se reconnaît l'auteur des réussites à venir : Grady, dix-sept ans, la bonne société, restée seule dans le New York des années quarante alors que ses parents voyagent en Europe, tombe amoureuse d'un gardien de parking et connaît une saison vibrante. Les personnages féminins de Capote sont magnifiques, avec une mention pour la furtive Anne, passionnée de moteurs et clés à molette, quelques pages si vivantes avant de se casser bizarrement la nuque.
Le hasard a voulu qu'on retrouve le manuscrit en 2004, ainsi que le raconte Alan U. Schwartz, ami et avocat de Capote chargé d'administrer ses droits littéraires : "... ce n'était pas une œuvre aboutie, mais elle témoignait de l'émergence d'une voix originale et d'un écrivain au talent aussi étonnant qu'efficace". Cette postface évoque quelques moments émouvants où l'écrivain, au bout du rouleau, supplie Schwartz de le "laisser partir". Il demeure manifeste qu'avec cette détresse, la littérature américaine a manqué des œuvres potentielles majeures, dont nous retrouvons les prémices du style dans "La traversée de l'été".
Nous nous contenterons de ce qu'il nous a laissé : j'espère lire "Prières exaucées" dont l'une des nouvelles, où certains de ses amis furieux se reconnurent, participa de la disgrâce et du déclin de l'artiste.
être l'écrivain d'un seul roman , c'est donc une légende?
RépondreSupprimerUne légende, oui selon moi, mais pas d'uns seul roman. Et de ces nouvelles ! Suivez les liens du billet sans oublier le fameux "De sang froid", chroniqué aussi sur Marque-pages (cf liste auteurs).
Supprimerje n'ai pas lu ce roman et Capote n'est pas la littérature que je préfère mais j'avais eu il y a pas mal d'année un faible pour son récit d'enfance si plein de sentiment et de poésie : un été indien
RépondreSupprimerJ'ai jusqu'ici apprécié tout ce que j'ai lu de T. Capote. Ses nouvelles,comme "Un été indien", sont des bijoux de sensibilité.
SupprimerJe crois que lorsque l'on aime un auteur, on est prêt à tout lire, juste pour le plaisir de le voir évoluer. Plus que les écrits de jeunesse, je crains le dernier livre, soutiré par l'éditeur. Là je m'abstiens !
RépondreSupprimerCe n'est pas son meilleur texte, de fait.
SupprimerCe fut un cas de conscience pour Schwartz, fallait-il le publier ? Capote dans ses volontés était flou à ce sujet. Après accord entre Sotheby's et la New York Public Library (il n'y eut pas d'acheteur aux enchères) qui possède désormais les documents, la responsabilité fut prise de publier.
SupprimerPour ma part, je suis content d'y accéder, il ne dévalorise pas l'auteur, si on sait qu'il ne fut même pas corrigé par Capote.
Je ne suis pas très attirée par Truman Capote et je serais plus tentée par le titre donné en commentaire par Dominique.
RépondreSupprimerC'est vous qui décidez.
SupprimerJ'avais bien aimé sa façon de parler de l'adolescence mais ce n'est pas le récit que j'ai préféré. Je n'avais pas aimé non plus prières exhaussées... En revanche, je compte lire de sang froid
RépondreSupprimerCapote est avant tout un grand nouvelliste, "De sang froid" est le seul long livre qu'il ait écrit. "Tiffany" est plus une longue nouvelle qu'autre chose. J'adore la plupart de ses "short stories".
SupprimerJ'ai aimé ce roman qui rend finement, comme vous l'écrivez, les impressions de l'adolescence.
RépondreSupprimerC'est vous qui l'aviez épinglé dans un commentaire et je l'ai commandé, sans savoir que c'est un premier roman. Écrire quelque chose d'aussi pénétrant à vingt ou même à vingt-cinq ans atteste un vrai talent.
SupprimerJe découvre ce roman que je lirais bien après avoir relu, il y a peu, "Le Blé en herbe" de Colette, pour rester dans les histoires d'adolescence et avoir un petit point de comparaison. Pourquoi pas ? D'autant plus que pour moi, cet auteur, c'est seulement celui de "De sang froid"...
RépondreSupprimerLe point commun entre "De sang froid " et ses nouvelles sont, me semble-t-il, la compassion infinie de Capote pour l'être humain. Il semble fasciné par leurs comportements extrêmes. Vous savez cela puisque vous avez lu ce livre «policier».
Supprimer"Le blé en herbe" ? Je l'ai lu vers les années 2000 et le souvenir que j'en ai le met vraiment très haut. Je me demande si ce Capote de 20 ou 25 ans peut être comparé au beau blé mûri de Colette (si je ne me trompe, elle l'a publié vers les 50 ans).