T.C. Boyle l'explique en note, il a tenté de raconter dans le roman "San Miguel" l'histoire de deux familles qui ont vécu et travaillé sur l'île, entre la fin du 19e siècle et la Seconde Guerre mondiale. Il s'est servi du journal de Marantha Waters, l'héroïne de la première partie, d'un texte d'Élisabeth (Élise) Lester "Le roi légendaire de San Miguel" et des souvenirs d'enfance de Betsy, fille cadette des Lester.
La petite île de San Miguel est la plus occidentale des Channel Islands, au large de la Californie, à quatre-vingts kilomètres de Santa Barbara. Aujourd'hui, elle est inhabitée (parc naturel).
Un roman en trois parties, trois récits, trois femmes courageuses : Marantha Waters, gravement malade des poumons, accompagne son mari dans un projet d'élevage ovin ; Édith sa fille est contrainte par son beau-père de revenir sur l'île après le décès de sa mère ; Élise, quarante ans plus tard, épouse d'Herbie Lester, aura une vie aussi rude mais les conditions offertes par la modernité adoucissent un peu l'isolement, malgré les désordres de l'entrée en guerre avec le Japon, de l'autre côté du Pacifique. Mais il n'y a qu'eux sur l'île, les eaux sont dangereuses, rares visites d'amis, parfois les tondeurs de moutons, pas de médecin, pas d'électricité. On mange de la viande d'agneau, forcément, et la découverte d'un vieux tonneau de bourbon enseveli dans le sable sur la plage – un naufrage – représente un trésor. Vivre sur San Miguel désertique est une confrontation permanente avec la nature sauvage, les vents et les brumes, les moutons et les phoques. Il faut être opiniâtre. Cela valut aux Lester la couverture de "Life", ce qui ne plut guère à Élise et ne valut aucune retombée financière. Puis le drame, en 1942.
T. C. Boyle est romancier, j'ai cru à un lien entre les deux premières parties et la suite qui voit débarquer les Lester, jeunes mariés, à San Miguel ; la seule continuité tiendra dans l'homme à tout faire, Jimmy, sur l'île depuis le siècle précédent, qui racontera à Élise ce qu'est devenue Édith Waters dont il était épris. Cette petite déception de lecteur romanesque est largement compensée par la sensible et minutieuse reconstitution de l'écrivain, par l'attachement à ces gens qu'on voit vivre et lutter jour après jour, heureux malgré tout ; certes pour Marantha et Edith, ce fut souvent l'enfer, alors qu'Élise s'adapta et mit au monde deux petites filles. À Noël, pas d'arbres à couper sur San Miguel, il fallait faire venir un sapin...
© La Libre |
Trouvaille perturbante, afin d'illustrer ma lecture, j'ai découvert un reportage sur la famille Lester, photographies et film, avec pour guide la blondine Betsy devenue une vaillante vieille dame. Émotion, car ce livre m'a accompagné chaque soir durant quelques semaines, je vivais un peu sur l'île, mesurant joies et peines de ces pionniers américains. Et puis les voilà comme ils étaient, pas tout à fait ceux que j'imaginais, mais ce sont eux... |
Channel Islands Films |
Voici un écrivain que je n'ai pas encore abordé, votre billet donne envie de se plonger dans cette ambiance insulaire.
RépondreSupprimerJ'ai appris à apprécier Boyle par ses nouvelles (je regrette d'avoir égaré un volume Grasset avec une sélection de 25 histoires d'amour).
SupprimerIci, prise de conscience sociétale et ironie sont mises de côté, défi réussi.
Je ne connais que de nom cet écrivain. Je note ce titre, tu donnes envie de découvrir la vie de ces trois femmes...
RépondreSupprimerC'est une relation sobre, perçue avec une grande sensibilité, de ce qu'a été le vécu de ces femmes et des hommes qui les ont convaincues de partager cette vie-là.
Supprimerun écrivain lu il y a longtemps mais dont je n'ai jamais oublié Water music je serais assez tentée par ce roman qui manifestement vous a touché
RépondreSupprimer"Water music" est parmi ses plus réussis. J'ai été surpris de lire "San Miguel" jusqu'au bout, et avec plaisir, ce genre de récit n'avait pas beaucoup d'arguments pour me convaincre, je crois que cela est dû au "métier" de l'auteur que je tiens à saluer.
SupprimerPareil, j'avais aimé Water music et Aux bons soins du dr kellogg
RépondreSupprimerJe ne connais pas du tout le second, sinon qu'on en a fait un film. Boyle a une grosse production de romans et nouvelles.
SupprimerBonne soirée Keisha.
Une lecture bien tentante, qui me rappelle un récit, sur une autre île, cette fois au large de l'Ecosse que j'avais beaucoup aimé. Je note donc !
RépondreSupprimerÀ bientôt Annie.
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