"«Bigger L.A.» [Los Angeles] est la matrice principale, pour ne pas dire exclusive, de son imaginaire narratif : la réalité physique de la ville, sur le plan topographique, toponymique, ou architectural, comme ses caractéristiques sociologiques, constituent un matériau obsessionnel." (Frédéric Sounac à propos de James Ellroy)
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Freddy Michalski
Qu'un roman raconte des péripéties horribles et violentes, qu'il nous donne le tableau d'une ville corrompue et pervertie par l'argent, le sexe et le pouvoir, tout cela n'empêche pas qu'il soit tenu en estime lorsqu'on en lit jusqu'au bout les cinq cents pages. Ce livre d'une densité incroyable, d'une profonde intensité, laisse un souvenir notoire mais ténébreux. La victime, Elizabeth Short, une jeune femme assassinée et mutilée, affecte le travail de nombreux membres du Los Angeles Police Department (LAPD) et bouleverse gravement celle de deux enquêteurs. Si cette fille devient un mythe dans le roman de James Ellroy, il en advint autant du vrai crime de 1947, jamais résolu : une vingtaine de livres ont été écrit sur les investigations criminelles de cette affaire.
"Le dahlia noir" (1987) marque surtout par un style aux phrases brèves, un style concis qui s'apparente à un compte-rendu efficace, incisif, rapide, "à la serpe" lit-on sur Wikipédia, où figurent des éléments, comme les rapports de police conformes, qui rappellent les collages de Dos Passos. L'ensemble dégage un réalisme qui s'éloigne radicalement de polars tapageurs et invraisemblables que j'ai laissés au bout de cent pages. Sans doute la noirceur du tableau est-elle exagérée, mais le roman procure un vif sentiment de véracité. Le réseau complexe d'intrigues qui se croisent contribue à rendre une société ambivalente aux moralités nébuleuses. L'influence de conjonctures extérieures et d'ambitions personnelles sur le cours de l'enquête est flagrante.
Pourtant tout n'est pas si sombre au final : "Cherchez la femme, Bucky. Souviens-toi de ça.", dit Lee Blanchard à son collègue Bleichert. Dans une postface écrite vingt ans plus tard (un peu boursouflée à mon goût), Ellroy reprend ces paroles et rappelle que sa propre mère fut violée et étranglée alors qu'il n'avait que dix ans. Enfin, il rend hommage à Betty Short, qu'une naïve espérance a conduite à sa perte : "Betty nous dépasse, elle est plus grande que nous". L'affaire du dahlia noir date d'un an avant la naissance de l'auteur.
Le crime captive toujours actuellement : Stéphane Bourgoin en a fait, selon toute apparence, un livre intéressant, "Qui a tué le dahlia noir?", où il rapporte son enquête et suggère le vrai tueur.
Très célèbre, mais plus improbable, l'enquête de Steve Hodel, ancien inspecteur gradé, qui conclut à la culpabilité de son propre père (voir "Paris Match" 1, 2 ,3).
Qu'un roman raconte des péripéties horribles et violentes, qu'il nous donne le tableau d'une ville corrompue et pervertie par l'argent, le sexe et le pouvoir, tout cela n'empêche pas qu'il soit tenu en estime lorsqu'on en lit jusqu'au bout les cinq cents pages. Ce livre d'une densité incroyable, d'une profonde intensité, laisse un souvenir notoire mais ténébreux. La victime, Elizabeth Short, une jeune femme assassinée et mutilée, affecte le travail de nombreux membres du Los Angeles Police Department (LAPD) et bouleverse gravement celle de deux enquêteurs. Si cette fille devient un mythe dans le roman de James Ellroy, il en advint autant du vrai crime de 1947, jamais résolu : une vingtaine de livres ont été écrit sur les investigations criminelles de cette affaire.
"Le dahlia noir" (1987) marque surtout par un style aux phrases brèves, un style concis qui s'apparente à un compte-rendu efficace, incisif, rapide, "à la serpe" lit-on sur Wikipédia, où figurent des éléments, comme les rapports de police conformes, qui rappellent les collages de Dos Passos. L'ensemble dégage un réalisme qui s'éloigne radicalement de polars tapageurs et invraisemblables que j'ai laissés au bout de cent pages. Sans doute la noirceur du tableau est-elle exagérée, mais le roman procure un vif sentiment de véracité. Le réseau complexe d'intrigues qui se croisent contribue à rendre une société ambivalente aux moralités nébuleuses. L'influence de conjonctures extérieures et d'ambitions personnelles sur le cours de l'enquête est flagrante.
Pourtant tout n'est pas si sombre au final : "Cherchez la femme, Bucky. Souviens-toi de ça.", dit Lee Blanchard à son collègue Bleichert. Dans une postface écrite vingt ans plus tard (un peu boursouflée à mon goût), Ellroy reprend ces paroles et rappelle que sa propre mère fut violée et étranglée alors qu'il n'avait que dix ans. Enfin, il rend hommage à Betty Short, qu'une naïve espérance a conduite à sa perte : "Betty nous dépasse, elle est plus grande que nous". L'affaire du dahlia noir date d'un an avant la naissance de l'auteur.
Le crime captive toujours actuellement : Stéphane Bourgoin en a fait, selon toute apparence, un livre intéressant, "Qui a tué le dahlia noir?", où il rapporte son enquête et suggère le vrai tueur.
Très célèbre, mais plus improbable, l'enquête de Steve Hodel, ancien inspecteur gradé, qui conclut à la culpabilité de son propre père (voir "Paris Match" 1, 2 ,3).
"Le dahlia noir" est le premier volet du (premier) Quatuor de Los Angeles. Il semble que le style épuré d'Ellroy soit poussé aux imites dans le dernier opus de la série, "White Jazz". On retrouve, paraît-il, Bucky Bleichert (le narrateur du dalhia) et son équipier Lee Blanchard, ainsi que leur amie Kay Lake, dans "Perfidia" (2015).
Je ne connais pas l'auteur, mais bien l'histoire de cette pauvre femme qui a fait couler tant d'encre.
RépondreSupprimerPeut-être, plus que l'histoire (quoique?), le tableau de la ville m'intéresse-t-il plus.
Bon week-end du 15 août!
La ville est surtout vue à travers ses quartiers et communautés glauques, évidemment, c'est un polar. J'ai vu le film (2006) de De Palma hier soir, il est moyen, je crois qu'il est fort difficile de rendre à l'écran un livre aussi compliqué. Pour bien des textes, c'est le cas, ce qu'on en tire peut être bien mais c'est autre chose ; je n'y retrouve pas ce à quoi j'ai été sensible. Le cinéma «commande» du spectacle.
SupprimerIl me semble qu'on peut parler de «littérature» avec ce livre d'Ellroy.
SupprimerUn livre "noir" bien sûr, mais que j'avais beaucoup aimé.
RépondreSupprimerAh tiens ? je ne savais pas que vous aimiez les polars de temps en temps. Il y a aussi tout ce qui entoure le dahlia noir, le vrai crime. Assez passionnant mais triste, vraiment.
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