But it was too late this time too. The Negro grasped his shirt, but the entire sleeve, rotten with washing, carried away, and he was out that door too and in the drive again, and had actually never ceased to run even while he was screaming into the white man’s face.
Behind him the white man was shouting, “My horse! Fetch my horse!” and he thought for an instant of cutting across the park and climbing the fence into the road, but he did not know the park nor how high the vine-massed fence might be and he dared not risk it. So he ran on down the drive, blood and breath roaring; presently he was in the road again though he could not see it. He could not hear either: the galloping mare was almost upon him before he heard her, and even then he held his course, as if the very urgency of his wild grief and need must in a moment more find him wings, waiting until the ultimate instant to hurl himself aside and into the weed-choked roadside ditch as the horse thundered past and on, for an instant in furious silhouette against the stars, the tranquil early summer night sky which, even before the shape of the horse and rider vanished, stained abruptly and violently upward: a long, swirling roar incredible and soundless, blotting the stars, and he springing up and into the road again, running again, knowing it was too late yet still running even after he heard the shot and, an instant later, two shots, pausing now without knowing he had ceased to run, crying « Pap! Pap! », running again before he knew he had begun to run, stumbling, tripping over something and scrabbling up again without ceasing to run, looking backward over his shoulder at the glare as he got up, running on among the invisible trees, panting, sobbing, « Father! Father! »
[Traduction de René-Noël Raimbault] :
Mais cette fois encore, il était trop tard. Le nègre attrapa bien la chemise, mais la manche tout entière, rongée par les lavages, céda, et le gamin fut hors de cette porte et de nouveau dans l'allée. Il n'avait littéralement jamais cessé de courir, même en criant dans la figure du blanc.
Derrière lui, celui-ci vociférait : « Mon cheval ! Qu'on m'amène mon cheval ! » et, pendant un instant, le garçon songea à couper à travers le parc, à escalader la clôture pour revenir sur la route ; mais il ne connaissait ni le parc ni la hauteur de la clôture couverte de vigne, et il n'osa pas se risquer. Il dévala dans l'allée, le sang bouillonnant, le souffle rauque ; tout de suite il fut sur la route, mais sans la voir. Il n'entendait pas davantage. La jument alezane lancée au galop fut presque sur lui avant qu'il l'eût entendue et, à ce moment encore, il continua de courir, comme si la violence même de son poignant chagrin jointe à la nécessité devait pendant un instant encore lui donner des ailes ; attendant jusqu'à la dernière seconde pour se jeter sur le côté de la route dans le fossé rempli d'herbes folles, tandis qu'avec un bruit de tonnerre le cheval passait, s'éloignait, furibonde silhouette fugitivement projetée sur le fond d'étoiles, de la calme nuit de ce début d'été, qui, avant même que l'ombre du cheval et du cavalier se fût évanouie, se dressa obscure, abrupte, intense : un grondement prolongé, vertigineux, irréel, qui voila un instant les étoiles. Alors le gamin bondit de nouveau sur la route, courant de nouveau, sachant que c'était trop tard, mais courant toujours même après avoir entendu le coup de feu et, un peu plus tard, deux coups de feu, s'arrêtant alors sans se rendre compte qu'il avait cessé de courir, en criant : « Papa ! Papa!» se remettant à courir avant d'être conscient qu'il avait commencé, butant, trébuchant sur quelque chose, se relevant sans cesser de courir, apercevant par-dessus son épaule, en se relevant, la lueur éblouissante, continuant de courir parmi les arbres invisibles, pantelant, sanglotant : « Père! Père ! »
William Faulkner - "L'incendiaire" ("Histoires diverses")
Extraordinaire passage, en effet!
RépondreSupprimerSept fois "run" dans les cinq dernières lignes !
SupprimerL'anglais (de Faulkner) est plus concis si l'on compare la surface des paragraphes.
Finalement disposer des VO n'est pas compliqué, j'ai assez facilement glané sur la Toile (PDF libre), celles de la trilogie des Snopes.
Grand merci pour l'extrait original en plus de la traduction - impressionnant !
RépondreSupprimerAvec plaisir, bon dimanche.
Supprimerune nouvelle de Faulkner qui a en elle toute la fureur, la puissance que l'on retrouve dans ses romans
RépondreSupprimerje n'ai pas encore lu ses nouvelles j'ai encore deux ou trois romans qui m'attendent
Dans quelques jours je proposerai cette préface de R-N Raimbault dont j'ai parlé. Elle me semble vraiment coller à ce qu'il faut comprendre pour aborder (et poursuivre) avec Faulkner.
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