Qu'est-ce que la biodiversité, ce mot qu'on entend et lit partout ? Au-delà de l'émotion que peuvent susciter les pandas, ours blancs et tigres qui disparaissent, qu'en est-il vraiment ? Préserver prairies et insectes pollinisateurs, réintroduire le loup : mais encore ?
Ce livre, paru en 2013 aux éditions de l'Aube, a répondu aux maintes questions que je me posais. La recension suivante est non exhaustive dans la mesure où je n'y aborde que les notions qui m'ont accroché, parce que je les ignorais ou les tiens pour importantes.
Un aspect notable de cette étude est l'ampleur de la diversité des espèces, qui dépasse ce que la science voit et répertorie. Si l'on tient compte des micro-organismes (eucaryotes, virus et bactéries), l'inventaire actuel (2 millions d'espèces selon "The conversation France") ne représente qu'un faible pourcentage du vivant effectif [10 à 100 millions d'espèces]. Maintes espèces apparaissent, mutent et disparaissent «en silence». La majeure partie de la biodiversité nous restera inconnue pour longtemps encore ; son immensité effraie un peu et incite au respect.
L'approche moléculaire durant la seconde partie du 20è siècle a introduit la notion de diversité génétique, de sorte qu'on distingue trois niveaux de diversité biologique.
L'approche moléculaire durant la seconde partie du 20è siècle a introduit la notion de diversité génétique, de sorte qu'on distingue trois niveaux de diversité biologique.
- La variation entre les populations : on peut par exemple observer des populations de truites et saumons très différentes dans des lacs scandinaves pourtant proches. La plupart des oiseaux et poissons marins présentent néanmoins une répartition sans discontinuité biogéographique évidente. L'analyse génétique permet de repérer les ensembles pour lesquels la probabilité d'accouplement est la même entre tous les individus de l'espèce ou pas.
- La variation entre les individus à l'intérieur de chaque population. Les accidents démographiques qui réduisent la taille d'une population à quelques individus (goulot d'étranglement) font que même si elle retrouve un effectif important, sa variabilité sera réduite.
- La variation au sein de chaque individu. La plupart des êtres organisés possèdent deux exemplaire de chaque gène (père, mère). S'ils sont identiques, on parle d'individus homozygotes, ainsi les plantes (blé, haricots) se reproduisant par autofécondation où la variation intra-individuelle est faible. S'ils sont hétérozygotes, les individus seront plus aptes à s'adapter à des variations environnementales : "L'homme a d'ailleurs pu jouer sur ce phénomène pour créer, par exemple dans le cas des maïs hybrides, des populations constituées d'individus possédant une forte diversité intra-individuelle – et donc une bonne capacité d'adaptation – mais tous génétiquement identiques, d'où parfois une grande vulnérabilité aux ravageurs".
La diversité des écosystèmes est inégale sur la planète. On trouve des lieux qui possèdent une concentration d'écosystèmes riches en biodiversité, tant en nombre qu'originalité des espèces. Ce sont les «points chauds», on en dénombre vingt-cinq : îles du Pacifique ou de l'Océan Indien, pourtour Méditerranéen, ... Compte tenu de notre connaissance limitée des espèces, n'y aurait-il pas d'autres point chauds que l'on ne voit pas ? La distribution de la biodiversité n'est-elle pas en réalité plus homogène ? Il semble que non. Deux arguments militent en ce sens.
- Une forte biodiversité d'un groupe serait prédictive d'une biodiversité plus générale : "la biodiversité appelle la biodiversité". Par exemple, la grande richesse des poissons de Nouvelle-Calédonie va de pair avec une très grande diversité des parasites branchiaux de ces espèces.
- Les «points chauds» ont une histoire qui explique leur richesse et leur originalité biologique. Ainsi le pourtour de la Méditerranée a servi de refuge à de nombreuses espèces animales et végétales pendant les glaciations, de sorte que sa biodiversité est plus riche qu'au nord de l'Europe.
Mais, direz-vous, dans ces zones favorables, les associations d'espèces ne pourraient-elles se séparer et s'associer à d'autres ailleurs, ne sont-elles pas le fruit du hasard, un peu comme les personnes présentes dans un wagon de métro ? La question se pose chaque fois qu'on veut modifier ou détruire un écosystème en raison d'activités humaines. Deux aspects sont à considérer.
- La perte d'un écosystème est irréversible, on ne peut pas en reconstituer les espèces autre part. On n'en connaît d'abord pas exhaustivement la biocénose (ensemble des faune et flore d'un biotope). Un écosystème est une entité «émergente», c'est-à-dire que ses propriétés ne peuvent être déduite de celles des espèces qui le composent. Transférée ailleurs, une espèce peut par exemple se révéler sensible à une agent pathogène qu'elle tolérait dans son milieu d'origine. On a l'exemple de plusieurs espèces de truites qui ne se croisent pas dans un milieu donné mais qui s'hybrident ailleurs, lorsque seule une autre espèce est présente.
- Le second aspect est relatif au caractère indispensable de toutes les espèces présentes au sein d'un écosystème, même les plus rares. Celles-ci peuvent avoir un rôle essentiel : l'auteur Bernard Chevassus-au-Louis donne l'image du jeu de mikado où l'on enlève un bâton qui fait s'effondrer l'ensemble.
L'exemple du Mikado est parfait!
RépondreSupprimerVous pensez bien que le sujet m'intéresse. Ma bibli possède Un iceberg dans mon whisky (un autre sujet)
J'ai apprécié la prudence et la mesure de ce scientifique, il ne tombe jamais dans le catastrophisme. Beaucoup d'exemples très variés aident à comprendre. Il est docteur honoris causa à l'université de Liège. Je proposerai quatre partie sur le sujet.
SupprimerBonne rentrée Keisha !
Quel sujet intéressant, très. Tant d'interactions dont nous ignorons les éléments. Merci, j'attends la suite bien sûr.
RépondreSupprimerCe sera avec plaisir, trois autres billets.
SupprimerEffectivement, l'exemple du mikado est très parlante. Ce livre date de 2013 ? J'en note les références, au cas où. Merci pour toutes ces informations.
RépondreSupprimerBonne journée.
Éditions de l'Aube, 2013, un livre complet pas trop bavard, avec beaucoup de cas concrets nécessaires pour mesurer les... diversités du sujet.
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